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Matière et/ou esprit ?

Pourquoi vouloir éliminer le corps et l’univers matériel de notre recherche spirituelle ? Ne faut-il pas au contraire l’accepter, l’intégrer et lui donner sa place sans confondre les plans et leur hiérarchie naturelle ? Ce que nous appelons ” péché ” n’est-il pas simplement cette erreur de jugement qui nous donne l’impression que le plan ” physique ” a une existence autonome et qu’il est capable de dominer notre Esprit ?

Valoriser la souffrance ou le plaisir ?

Dans les recherches dites « spirituelles » et les religions, il existe une tendance tenace à vouloir éliminer le corps comme expression du “mal” en nous. On nous parle de la “chair” et du “monde mortel”, et on les associe à l’idée d’un anti-Dieu appelé “Satan”.

Lorsque nous parlons de la vie des saints, nous insistons surtout sur les souffrances qu’ils ont endurées et sur l’abandon sacrificiel de leur enveloppe physique. Cela semble être le meilleur moyen de retourner dans le giron du Créateur. C’est pourquoi de nombreux ascètes, même en dehors de la sphère chrétienne, présentent la mortification du corps physique comme un mode de prière absolu, capable de libérer l’âme d’un corps associé au péché.

De même, l’image de Jésus crucifié est statistiquement plus valorisée dans la conscience des chrétiens que le “Christ de gloire”. L’accent est davantage mis sur l’humain et ses fragilités en nous que sur le “divin” qui est censé être notre essence. Le Sacré-Cœur, qui est au centre de la vie du Christ, est lui-même souvent représenté transpercé et saignant. Cet archétype religieux révèle l’étrange façon dont l’imagination humaine regarde la faiblesse qui nous limite plutôt que la force qui nous anime du matin au soir, même lorsque nous dormons.

C’est sans doute aussi cet attachement morbide à la souffrance comme moyen de rédemption qui nous empêche de saisir la véritable symbolique de l’incarnation de l’homme Jésus, venu témoigner de l’évidence de la présence du “Christ” en chaque être humain.

L’incarnation : chemin ou obstacle ?

Si la chair était un obstacle à la réalisation du Christ, on pourrait se demander pourquoi le Créateur a choisi de se manifester ainsi à travers sa création. Oserions-nous l’accuser de perversité si nous pouvions seulement imaginer que le Dieu d’Amour dont on nous parle est capable, dans le même souffle, de nous tendre un piège aussi machiavélique ? La crédulité humaine doit être insondable pour qu’une telle conception ait pu perdurer aussi longtemps et même continuer à nous aveugler aussi massivement. Réveillons-nous et réalisons enfin que c’est cette vision négative de l’incarnation qui nous prive de son essence.

Malheureusement, ce ne sont pas les religions qui tentent de nous réveiller, même si elles prétendent que c’est leur but, c’est la science elle-même. Et elle n’a pas besoin de revêtir les masques de la spiritualité pour le faire. Nous avons tous appris que E=MC2 et pourtant, bien que nous sachions théoriquement que tout est énergie, nous continuons à considérer la foi en l’invisible comme une spéculation fantaisiste.

Certains affirment même haut et fort qu’ils ne croient que ce qu’ils voient, alors qu’ils utilisent quotidiennement leur téléphone portable, le Wi-Fi, les connexions Bluetooth, la radio, la télévision, les radars, les drones, les lasers, etc. La liste est longue. Ces héritiers de saint Thomas remarquent-ils à quel point ils refusent de comprendre à quel point leur position est intenable ? Ils peuvent parler, sans lien physique, dans un minuscule appareil avec un interlocuteur virtuel à des milliers de kilomètres, mais ils refusent de voir que nous sommes en train de basculer dans une réalité invisible.

Ils vivent au XXIe siècle mais restent attachés à la façon de penser des hommes à la nuque raide que l’Ancien Testament fustigeait il y a si longtemps. Non, ils n’ont pas changé du tout et pourtant ils vivent dans l’évidence, fiers de la rigidité de leur ego. Le monde qu’ils appellent “visible” s’écroule peut-être autour d’eux, mais ils sont toujours debout, les deux pieds fermement plantés dans le béton de leurs convictions. Ils ne remarquent même pas ou ne veulent pas remarquer que l’émotion musicale ou artistique fait aussi partie de l’invisible. Sont-ils seulement capables de vivre le véritable amour, celui qui n’a besoin ni de preuves ni de liens pour mettre quelqu’un à genoux ?

Recherche scientifique et humilité

Pourtant, un peu d’humilité, un simple lâcher-prise et une certaine ouverture d’esprit pourraient leur permettre de comprendre que l’on ne voit que ce que l’on croit. Mais ne vous y trompez pas. Il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’à la foi aveugle qui consiste à imaginer ce qui n’est pas encore. Il suffit d’observer ce qui est là, sous nos yeux. Il suffit de voir que le matin, le soleil se lève sans que nous ayons à appuyer sur une télécommande, et que nous n’avons pas été privés d’oxygène pendant la nuit malgré la pollution.

Faudra-t-il un accident vasculaire cérébral pour qu’ils réalisent que quelque chose de mystérieux faisait circuler le sang dans leur cerveau jusqu’à présent ? Faudra-t-il un cancer, une crise cardiaque ou une autre défaillance corporelle pour qu’ils sachent enfin qu’ils ne contrôlent rien.

Cette “illumination” s’appelle l’humilité… Mais il y en a pour qui les défis vitaux ne suffisent même pas. Ils ne veulent pas lire les signes, leur ego hypertrophié résiste et leur cache encore la vue.

Mais revenons à ce monde dit de la “matière” et jetons-y un regard neutre. Que voyons-nous ? Un univers remarquablement construit dont l’interdépendance défie la logique humaine. En fait, cette complexité est impensable. Il est impossible d’en reproduire tous les détails, même avec l’ordinateur le plus sophistiqué.

La seule solution que nous ayons trouvée est de l’interpréter de manière linéaire, et c’est notre religion. La raison en est que l’esprit logique est numérique et que l’univers ne l’est pas. Le monde qui nous entoure ne répond pas par “oui” ou par “non”. Il peut dire oui et non en même temps, ainsi que tous les opposés des opposés que nous pouvons imaginer.

Aux frontières de la pensée logique

En ce sens, nous devons constater que nous avons atteint les limites de notre mode de pensée scientifique. Lorsque la physique dite “quantique” a établi que l’observateur affecte inévitablement la chose observée, nous avons atteint la frontière où, à défaut de passeport, nous devons accepter un changement de dimension.

Nous avons pratiquement exploré toute la surface du globe, et même certaines de ses profondeurs. Il ne reste plus de continents à découvrir “là-bas”. Les futurs Christophe Colomb et Marco Polo devront explorer nos continents intérieurs en changeant de méthode.

L’observateur devra se retrousser les neurones et devenir son propre objet d’observation. La découverte du mystère de la vie ne se fera pas en disséquant de l’extérieur des corps morts ou mourants. Il faut maintenant plonger dans le vif du sujet, explorer notre conscience vivante.

Si nous voulons continuer à évoluer, il est essentiel que nous restions pleinement conscients de notre conscience, en nous dépouillant de toutes les croyances qui nous enferment dans l’illusion de la dualité.

Seule “la vérité nous libérera”. Mais de quelle vérité parle-t-on ? Et de quelle liberté s’agit-il ? (A suivre)

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